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Odeur, Goût, Saveur, Flaveur…

Les neurophysiologistes spécialistes du comportement alimentaire ont donné des définitions précises des termes utilisés dans les domaines de l’olfaction et de la gustation. Ces termes sont très couramment utilisés avec des sens sensiblement divergents par le public. Il nous paraît donc indispensable de les préciser ici, afin d’éviter des confusions.

Les sens

Les organes des sens (la vue, l’olfaction, la gustation, le sens tactile et même l’audition) sont largement mis à contribution dans la recherche, la reconnaissance et l’ingestion de nos aliments. A la naissance, le nourrisson est déjà capable d’identifier l’odeur de sa mère : dans sa vie intra-utérine, il a été baigné dans le liquide amniotique et a enregistré un certain nombre d’odeurs et de gouts qu’il retrouve ensuite dans le lait maternel. L’enfant l’ors de sa croissance, réalise des expériences gastronomiques variées, qui dépendent de son milieu familial, social, culture et religieux. Ses organes des sens sont sollicités pour inscrire dans sa mémoire ces expériences plus ou moins heureuses.

L’être humain

A l’adolescence les habitudes alimentaires se stabilisent. Des études ont montré que les individus deviennent réticents pour essayer des plats inconnus : on désigne ce tait sous le nom de néophobie. En revanche, ils développent des préférences, parfois vives, dirigées vers certains mets. En vieillissant, les organes des sens sont moins performants : la vue baisse, l’olfaction diminue et la gustation s’amenuise. Ces phénomènes naturels sont bien connus des industriels des agro-industries, qui compensent ces pertes sensorielles en ajoutant des arômes dans les plats cuisines ou les spécialités laitières.

L’olfaction

L’olfaction est le sens perçu directement par le nez.

L’odeur

L’odeur d’un aliment est d’autant plus forte que la volatilité des molécules dans l’air est grande. A contrario, une molécule ne sent rien si elle est insoluble dans l’eau, dans les graisses ou dans les solvants organiques. La température de l’air et surtout les odeurs ambiantes modifient considérablement les perceptions olfactives. Il en est de même pour certaines périodes du cycle ovarien ou l’état de grossesse. Certaines personnes perdent plus ou moins complètement le sens olfactif, lors de rhinites ou de façon plus durable, accidentelle. On parle alors d’anosmie (Perte de l’odorat).

La gustation

La gustation est le sens du gout. On trouve encore, dans les ouvrages destinés au grand public, un certain nombre de simplifications abusives sur cette perception. On a coutume de définir cinq familles de goût: les goûts sucrés, les goûts amers, les goûts acides, les goûts sales et le goût « umami», dit encore « goût des plats des restaurants chinois ». En fait, la réalité est beaucoup plus complexe.

Au niveau de la bouche, d’autres composantes sensorielles de l’aliment sont encore analysées par les récepteurs tactiles de la langue et des muqueuses. Il s’agit du chaud et du froid, du moelleux, du gluant, de l’astringent, du pétillant, etc. A l’aide des récepteurs des muscles masticateurs et des racines dentaires on analyse la dureté ou la tendreté des aliments. A partir de la cavité buccale, le craquant et le croustillant sont transmis à l’oreille et ces sons participent aussi du plaisir de manger. La cavité buccale, par la chaleur dégagée par la langue et par l’apport de salive adapte aux types d’aliments, permet de développer ce que l’on appelle l’arôme. Ces nouvelles odeurs sont analysées par la voie rétronasale lors de la déglutition. La composante olfactive essentielle semble d’ailleurs être apportée principalement par cette voie. 

Pour s’en assurer, il suffit de se boucher le nez lors de la déglutition, comme l’avait déjà écrit Brillat-Savarin (1755 – 1826) en1826. 

Notons que le terme « arôme » désigne également une matière aromatique, ou aromatisante, définie comme suit par le Conseil de l’Europe : « Une matière aromatisante est une substance qui possède des propriétés essentiellement odorigènes et éventuellement sapides (qui a du goût, de la saveur). Une matière aromatisante naturelle est une substance obtenue à partir des sources végétales, et parfois animales, exclusivement au moyen de traitements physiques appropriés. »

La flaveur

Les comportements sensorielles de l’aliment sont multiples et font appel à des « sens chimiques » (odeur, goût) et à des « sens physiques » (chaud, froid, sens tactiles, audition). Il est donc très difficile d’évaluer l’apport relatif de ces stimulations sensorielles dans la perception globale de l’aliment. 

Selon l’Oxford English Dictionary, ce terme vient du vieux français « flaour » : flairer. Il a été pratiquement abandonné en français, peut-être à cause de son « animalité » pour désigner des sensations humaines. Il est resté depuis le Moyen-Age en langue anglaise et est revenu, tout naturellement, car nous avions besoin d’un mot pour rendre compte de la complexité de la perception sensorielle de l’aliment.

Les neurophvsiologistes, spécialistes du comportement alimentaire humain et animal, ont adopté, avec Jacques Le Magnen (1916 – 2002) depuis 1970, le terme de flaveur.

Le Grand Larousse universel (15 volumes) en donne depuis la définition suivante : 
« Ensemble des sensations olfactives, gustatives et olfactives ressenties lors de la dégustation d’un produit alimentaire. » 

Le Robert (14 volumes) précise : « Pour designer cette collusion goût-odorat, les savants ont ressuscité un vieux mot français : le mot flaveur. »