Des origines lointaines : Trois Continents
Trois plantes de régions tropicales issues de trois continents différents. Le café trouve son origine sur le continent africain au sud-ouest de l’Ethiopie dans les provinces de Kaffa et Sidamo, le cacao sur le continent américain dans le Sud mexicain au fin fond de l’Amazonie, et le thé en Asie, perché dans les montagnes au sud-ouest de la Chine.
Trois familles botaniques
Trois familles botaniques différentes. Celle des Rubiacées comme le gardénia, le quinquina genre Coffea pour le café, celle des Sterculiacées, comme la noix de cola, genre Theobroma pour le cacao et la famille des théacées genre Camellia pour le thé.
Pour le cacao et le café on utilise les graines mûres extraites des fruits, pour le thé, ce sont les jeunes feuilles que l’on récolte.
Des boissons au parcours similaire : Des boissons du divin
Le café comme le thé, qui furent a l’origine consommés pour leur propriété à maintenir éveillé, étaient préparés en décoction lors des prières des soufis
pour le premier ou des moines bouddhistes pour le second.
Concernant le café, une légende des Mille et Une Nuits (10ème siècle) raconte qu’un jeune berger yéménite étonné de l’excitation permanente de son troupeau de chèvres, remarqua qu’elles étaient très friandes de baies rouges poussant sur un arbuste. Il les goûta, ce qui le rendit hilare et plein d’énergie. Les prieurs soufistes de la communauté auxquels il rapporta sa trouvaille eurent l’idée de préparer une décoction de ces baies, et prirent alors l’habitude d’en consommer pendant les prières afin de rester éveillés.
On appellera ce breuvage “vin d’Arabie” par opposition au vin de messe des chrétiens.
Le cacao fut divinisé dès son origine par les Mayas, les Toltèques puis les Aztèques. Au Xème siècle le cacaoyer était considéré comme un arbre sacré, vénéré et cultivé par le grand prêtre et roi du peuple Toltèque, Quetzacoatl, qui se réincarna en Serpent a plumes. Les Toltèques vouèrent alors un culte à Quetzacoatl réincarné et ritualisèrent la consommation du cacao en le transformant en breuvage.
Au XIV° siècle ils le léguèrent aux Aztèques qui l’utilisèrent lors des cérémonies sacrificielles, y ajoutant alors un colorant rouge, le roucou – ou achiote – symbolisant le sang.
De la monnaie d’échange à la convoitise européenne
Fèves de cacao et galettes de thé furent de véritables monnaies d’échange dans les régions d’origine et prirent une dimension économique non négligeable. Les unes comme les autres faisaient partie du tribut prélevé dans les zones de production. De fait, Christophe Colomb, lorsqu’il aborda l’île de Guanaja en 1502, bien que n’appréciant guère cette boisson sacrée très amère que lui offrirent les Aztèques à son arrivée, s’empressa de troquer des sacs remplis de fèves contre quelques marchandises.
Ces trois plantes rapportées par les voyageurs occidentaux dans les cours européennes dès le 15 ème siècle et considérées comme des denrées exotiques fascinantes, devinrent des boissons de luxe, d’abord prescrites par les médecins. Au fil des siècles, elles conquirent toutes les couches de la population occidentale, tour à tour diabolisées puis encensées, alternant entre la boisson médicament et la boisson plaisir.
Les cours européennes se sont partagé le monde et ont rivalisé pour produire ces trois plantes. Les plantations se déplaçant d’un continent à un autre au gré des conquêtes et des luttes de pouvoirs entre les différentes empires européens, on pouvait même parler de concurrence à cette époque. Le thé était plutôt philosophique, le café plutôt politique, quant au cacao, plutôt divin, il était aussi peut-être le plus sensuel des trois…
Alors que la Chine a préservé sa tradition de consommation du thé, celle du café et du cacao s’est quasiment perdue dans leurs régions d’origine. Tous deux sont devenus des boissons occidentales produites dans les pays consommateurs du Nord.
L’atout du thé, pour les pays producteurs, est qu’il sort de la plantation “fini” avec une certaine valeur ajoutée.
Le café et le cacao, encore majoritairement des matières premières lorsqu’ils quittent les pays producteurs, sont donc sujets aux fluctuations boursières, ce qui n’est pas le cas du thé. Ces plantes firent l’objet de nombreux ouvrages, dont le plus ancien et le plus célèbre est le Traités Nouveaux et Curieux du Café, du Thé et du Chocolaté écrit par Philippe Sylvestre Dufour (1622 – 1687) en 1685.
Un goût commun : L’amer
Ces plantes ont un goût commun : l’amer. Pour atténuer cette amertume, les Arabes et les Mayas eurent l’idée de torréfier respectivement les grains de café et les fèves de cacao, et les Chinois de fixer à la chaleur ou d’oxyder les feuilles de thé.
De la soupe épicée à la boisson douce et lactée
Dans leurs régions d’origine, ces boissons amères étaient consommées souvent mêlées à des épices, du sel et de la farine de céréales, ce qui en faisait de véritables soupes.
Les grains de café étaient torréfiés, pilés, puis préparés en décoction, mélangés parfois à des épices telles que le clou de girofle, la cannelle, la vanille… Les fèves de cacao, broyées sur une pierre avec un pilon, éteint pétries pour former une pâte.
Cette pâte diluée dans de l’eau chaude et fouettée – ce que les Aztèques appelaient le xocoatl et qui donnera le chocolat -, était agrémentée tantôt de vanille, de piment, d’achiote, de poivre, de cannelle ou de farine de maïs.
A cette même époque, le thé était consommé en soupe, avec des épices et autres condiments, puis fouetté. On pouvait ajouter éventuellement à ces trois boissons une pincée de sel ou de poivre, mais jamais de sucre. L’amertume ressortait donc.
Le palais des Occidentaux étant peu porté sur la saveur amère, les Européens eurent l’idée de rajouter à ces boissons le goût sucré (sucre et miel principalement) ainsi que du lait afin d’en atténuer l’amertume et l’astringence.
Des plantes toniques
Dés leur arrivée en Europe, ces plantes furent réputées pour faciliter la digestion, réveiller l’esprit et purifier le sang. En effet, faisant partie de la famille des toniques, elles ont des propriétés énergisantes, grâce entre autres à la théine ou caféine qu’elles renferment toutes tous en quantité variable.
Une tasse de 100 millilitres de café filtre peut en contenir entre 50 et 175 milligrammes, et 100 grammes de chocolat noir entre 20 et 200 milligrammes. Thé et cacao ont aussi en commun un autre alcaloïdes, la théobromine aux propriétés diurétiques puissants, le cacao en contenant beaucoup plus que le thé (0,2 % pour la feuille de thé et 2 à 3 % pour la fève de cacao.)
Tous deux ont aussi des vertus antioxydantes puissantes dues à leurs polyphénols dont les catéchines.