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Des Épices et des Hommes

Les épices et les hommes ont toujours eu des liens particuliers depuis la nuit des temps. Objet de sollicitations et d’enjeux depuis des siècles, elles ont foncièrement modifié notre quotidien tant dans le domaine culinaire mais également la beauté ou encore la décoration.

La Chine

En Chine, les plantes à épices étaient déjà utilisées, plusieurs millénaires avant Jésus-Christ, pour leurs vertus médicinales et culinaires.
Des traités, encore présents aujourd’hui, le précisent.

L’Inde

En Inde, les femmes ont préparé très tôt des mélanges de poivre, de rhizome de curcuma, de graines de cardamome pour fabriquer une pâte jaune destinée à aromatiser leur plat quotidien à base de riz. Ce mélange est encore à l’origine de la poudre, appelée « curry », utilisée dans la cuisine d’origine indienne.
Des témoignages, gravés sur des tablettes d’argile sumériennes, nous indiquent que les habitants de la Mésopotamie connaissaient déjà le cumin, la coriandre, le fenouil, le safran et le thym.

L’Égypte

En Egypte, à l’époque des pharaons, le papyrus Ebers (l’un des plus anciens traités médicaux connus qui est daté du XVIᵉ siècle av. J.-C., pendant le règne d’Amenhotep Iᵉʳ) nous renseigne sur l’utilisation des épices dans le traitement des maladies.
Les plantes aromatiques de par leurs molécules à propriétés antiseptiques, étaient utilisées avec le sel pour l’embaumement des morts, mais elles servaient aussi à des préparations culinaires.

Grecs et Romains

Les Grecs et les Romains en faisaient un usage quotidien. Marcus Gavius Apicius (25 av. J.-C. / 37 ap. J.-C.) nous a laissé un ouvrage de gastronomie, les Dix livres de la cuisine, dans lequel des préparations culinaires, assez insolites pour nos palais actuels, font appel au poivre, au thym, à l’origan, à la moutarde, à la livèche au carvi, à l’aneth et à la coriandre.

Le Moyen Âge

Au Moyen Age, Charlemagne (date inconnue – mort en 814) préconisa la culture des « bonnes herbes » dans les jardins impériaux. Le Capitulaire De Villis nous en donne la liste. (Le Capitulaire De Villis, ou plus exactement le Capitulare de Villis vel curtis imperii est un acte législatif datant de la fin du VIIIᵉ ou du début du IXᵉ siècle.)

Des Croisades à nos Jours

Avec les Croisades, le commerce des épices connut un nouvel essor en Europe occidentale. Venise, Gênes, Marseille et Sète ont été les principaux ports spécialisés dans ce commerce.

Mais la prise de Constantinople, en 1453, perturba grandement ce commerce maritime méditerranéen.
Christophe Colomb (1451-1506), puis Vasco de Gama (1469-1524) ouvrirent de nouvelles routes au commerce des épices.
Le monopole de ce commerce, ainsi partagé entre Espagnols et Portugais, s’acheva à la fin du XVI e siècle avec l’expansion coloniale des Pays-Bas et de l’Angleterre.

Les épices, très appréciées pour leur flaveur exotique depuis la Renaissance et utilisées aussi bien pour aromatiser les plats que les vins, n’ont cesse d’être consommées largement depuis.

La culture du muscadier et du giroflier a été rendue possible sur l’ile de la Réunion grâce à la patience et la ténacité du botaniste Français Pierre Poivre (1719-1786) et en dépit de l’hégémonie hollandaise.
Les épices, condiments et aromates ont accompagné l’homme dans ses voyages maritimes. Duhamel du Monceau (1700-1782) nous indique les moyens de conserver la santé des équipages des vaisseaux, à l’aide de citron et de cresson, plantes riches en acide ascorbique (vitamine C) et propres à lutter contre le scorbut.

Avec l’apparition, à la fin du XVIII e siècle, des premiers restaurants à Paris et les traités culinaires et gastronomiques de Grimod de la Reynière (1758-1837), de Brillat-Savarin (1755-1826) et d’Antonin Carême (1783-1833), l’utilisation des épices a été mieux codifiée.
En 1830, la conquête de l’Algérie fera découvrir aux Français de nouvelles flaveurs épicées.
Après la guerre de 1939-1945 et l’essor de l’émigration, de nombreux restaurateurs chinois, vietnamiens, indiens s’établirent en Europe comme aux Etats-Unis, y important leurs coutumes gastronomiques.